Au début de juillet 2021, l’architecte Dr José Linares Ferrera, Pépé, nous a quittés, regretté par ses collègues et ses amis. Nous avons perdu un représentant essentiel de la culture et en particulier de la muséographie de Cuba, pour lesquelles il avait dédié sa vie et s’est investi jusqu’au dernier instant. 

Né dans une famille modeste, il était fasciné depuis son enfance par le monde des musées, alors presqu’inexploré, et se caractérisait pour son bon goût et ses grands talents en dessin, design et création. Chez Servando Cabrera, il rencontra Marta Arjona, alors qu’elle était investie dans la création de ce qui allait devenir l’énorme réseau de musées que possède le pays, ce pourquoi nous leur devons beaucoup.

Diplômé en architecture, il effectua ses études supérieures dans cette discipline au sein de l’université Caroline de Prague, où il obtint d’excellentes notes. Il continua à travailler avec Marta sans interruption dans le projet de créer de nouveaux musées et de former du personnel pour assurer les tâches dans ces nouvelles institutions. Il fut aussi le principal partisan des plus importants projets de transformation et d’adaptation des musées préexistants, en mettant en valeur le travail entrepris dans les musées Oscar M. Rojas de Cárdenas et Emilio Bacardí à Santiago de Cuba. Il organisa et participa activement aux échanges culturels réguliers entre les pays du bloc soviétique et assura le commissariat des plus importantes expositions qui furent présentées pour la première fois dans le monde, principalement grâce aux financements de ce qui était alors appelé le musée national.

Quand la Loi 23, concernant la création des musées municipaux, entra en vigueur, il dirigea une équipe en charge de la création de ces institutions, depuis la municipalité de Maisí, à l’extrême est de Cuba, jusqu’à Sandino, à Pinar del Río. C’était une tâche titanesque, de laquelle il obtint de quoi théoriser cette expérience unique à l’échelle de la région et du monde. 

Il développa une grande pédagogie et un travail éducatif, qui lui permirent de traduire ses pratiques dans d’importants textes à propos de la muséographie, qui constituent des références essentielles à l’échelle nationale et internationale. 

Il est le fondateur de la première organisation régionale des musées en Amérique latine et dans les Caraïbes rattachée au Conseil international des musées (ICOM), auquel il resta lié jusqu’à sa mort en occupant la position de président honoraire à vie. Il représenta Cuba dans de nombreux évènements de cette organisation internationale et participa à plusieurs Conférences générales. Il donna des conférences dans sa spécialité et sur ses nombreuses publications et recherches sur les centres culturels et éducatifs. Il fut membre du conseil d’administration d’ICOFOM LAM, à présent renommé ICOFOM LAC, de 2017 à 2020. 

Durant plusieurs années, il poursuivit une collaboration étroite avec la République dominicaine, en enseignant et en travaillant dans les musées de ce pays, en particulier le site historique de Montecristy.

Il fut associé, en tant que chef de projet, à la création du musée mémorial José Martí, au pied du monument du même nom qui fut inauguré en 1995. Il rencontra Fidel Castro, pour lequel il avait une énorme admiration, ce qui le rendit extrêmement fier. À nouveau, dans le cadre du grand projet de nouveau musée national des beaux-arts, le commandant en chef lui confia le rôle de principal artisan, ce qui culmina en 2001 avec l’expansion de cette importante institution comptant trois  bâtiments dans le centre historique de la ville. Il continua immédiatement le gigantesque chantier de transformer le bâtiment de ce qui allait devenir le Colegio de San Gerónimo, conjointement avec son ami proche Eusebio Leal, avec lequel il entretenait une amitié profonde.

Ensemble, ils partagèrent la présidence du comité cubain de l’ICOM, puis il occupa lui-même le poste de président, sur élection de tous ses collègues. 

Il reçut les plus importantes décorations dans le secteur de la culture, tels que la distinction pour la culture nationale, l’ordre de Juan Marinello, la médaille Alejo Carpentier, le prix national pour le patrimoine culturel et beaucoup d’autres, d’envergure internationale pour certains.

Il était membre d’UNEAC, d’UNAIC et professeur en spécialité de muséographie au Colegio de San Gerónimo à l’université de La Havane. 

En septembre 2021, il aurait eu 81 ans. 

 

Écrit par Moraima Clavijo.

Traduit par Marion Bertin.